lundi 24 mai 2010

De la tête aux pieds - Philosophie du football

SORTIE LE 27 MAI

Thierry Henry aurait-il mieux fait de jouer au handball?

Le résultat du match aurait-il été le même si je ne l'avais pas regardé?

Pourquoi dire "on a gagné!" alors qu'on n'était même pas sur le terrain?

Pourquoi les femmes sont-elles incapables de comprendre le hors-jeu?

Eric Cantona a dit un jour: "Quand les mouettes suivent le chalutier, c'est parce qu'elles pensent qu'il jettera des sardines à la mer." A part ça, on ne voit pas bien le rapport entre le football et la philosophie. Pourtant, ce sport internationalement vénéré mérite bien qu’on se penche dessus. Pourquoi, quand onze types qu’on ne connaît ni des lèvres ni des dents gagnent une épreuve sportive, y a-t-il des dizaines de millions d’autres qui pensent avoir gagné quelque chose ? Vous verrez que Cicéron, Aristote, Hegel, Camus et Hobbes ont aussi leur mot à dire sur la main de Thierry Henri, la tête de Zidane ou les pieds de l’arbitre.

jeudi 20 mai 2010

Chronophage

Chronophage adj. qualifie une activité vaine qui fait perdre beaucoup de temps qui pourrait être consacré à autre chose

Chronophage est un mot qu'existe pas (et qu'on utilise quand même) qui appartient à une catégorie somme toute assez rare : celle des mots qui mériteraient d'exister, car il n'en existe aucun pour désigner la même chose. Rappelons que les deux classes les plus courantes de mots qu'existent pas (et qu'on utilise quand même) sont d'une part les mots qui ne servent à rien parce qu'il y en a un autre qu'existe et qui veut dire la même chose (on pensera notamment à inatteignable, inhomogénéité ou encore solutionner), d'autre part les mots dérivés de mots qu'existent mais qui sont trop compliqués à utiliser, du coup on les simplifie, quitte à passer pour un témoin d'une émission de Jean-Luc Delarue (parmi lesquels les verbes croiver, soyer ou taitre), et enfin les anglicismes abominablement francisés chers aux gestionnaires de projets en mal de reconnaissance, comme ouorquepaquaige ou délivrable. Les trois classes les plus courantes ! Les trois classes les plus courantes de mots qu'existent pas sont les mots qui servent à rien, ceux qui remplacent un mot qu'existe et qu'est trop difficile à utiliser, les anglicismes des gestionnaires de projet, et les mots que les journaleux s'approprient d'un seul coup comme un seul homme comme s'ils les connaissaient depuis toujours et restituent tant bien que mal parce que c'est la mode, comme seupraïme ou chainnainain. Les quatre classes les plus courantes... non... parmi les classes les plus courantes de mots qu'existent pas (et qu'on utilise quand même), on retrouve ceux qui servent à rien, ceux qu'en remplacent un trop compliqué, les anglicismes à la con, et les modes journaleuses. Et les dérivations de marque comme gougueuliser ou stabiloter. Et crotte ...!

La preuve est faite, l'établissement d'une classification des mots qu'existent pas (et qu'on utilise quand même) est une activité aussi chronophage que l'établissement de la liste des armes de l'inquisition espagnole.


lundi 10 mai 2010

Manifeste pour faire de la betterave une exception grammaticale

On le sait, la grammaire française est riche en exceptions qui la rendent inextricable pour qui ne dispose pas d'un bon Grévisse à portée de main. Il est cependant une exception qui fait cruellement défaut, ce qui induit des formulations ineptes sur le plan de la logique, et permettrait de distinguer la betterave potagère de ses sœurs sucrière ou fourragère (distinction certes bien établie sur le plan botanique, mais qu'il conviendrait, et c'est là un combat que je n'aurai de cesse de mener, d'établir enfin formellement sur le plan linguistique). Au nom de quoi foutredieu devrait-on dire, ainsi que le suggèrent tous les dictionnaires, un champ de betteraves et non un champ de betterave, alors que l'on dit bien un champ de blé ?

En première approche, l'explication semble évidente. Le blé est indénombrable, comme du reste l'oseille ou le grisbi, et on ne peut avoir vingt-sept blés dans un sac, on a du blé, c'est un sac de blé, qui vient d'un champ de blé. Tout va bien. La betterave, en revanche, est dénombrable, et on peut fort bien avoir vingt-sept betteraves dans un sac, même si l'on ne voit pas bien ce qu'on en ferait, c'est un sac de betteraves, tout va bien. Jusque là je suis d'accord, un sac de betteraves reste un sac de betteraves, parce que la betterave est dénombrable, et il est possible de savoir exactement combien de betteraves il y a dans un sac (l'expérience montre curieusement qu'il y en a le plus souvent vingt-sept). Mais dans un champ ? Qui osera jamais proclamer qu'il a un jour compté exactement le nombre de betteraves qu'il y avait dans un champ ?

Il est donc clairement évident qu'il existe outre les noms dénombrables et les noms indénombrables une troisième classe de noms, celle des dénombrables indénombrés (au rang desquels la betterave, donc), la classe des indénombrables dénombrés étant par nature un ensemble vide qui ne présente par conséquent qu'un intérêt epsilonesque. En effet, que dit le bon sens paysan ? Le bon sens paysan ne dit pas : "Cette année je vais planter des betteraves", le bon sens paysan dit : "Cette année je vais faire de la betterave". Parce qu'il a autre chose à glander que de les compter, ses betteraves, le bon sens paysan ! Il serait donc de bon ton qu'une bonne fois pour toutes, Robert et consorts prêtent l'oreille au bon sens paysan, admettent l'existence des dénombrables indénombrés, et nous laissent parler à notre guise de champs de betterave.

Alors d'accord, pour la betterave potagère, je dis pas, ça s'achète à l'unité, je veux bien, mais la betterave fourragère ou sucrière, ça se traite au tombereau ou à la tonne, alors, hein...