vendredi 24 juin 2011

TAIS-TOI ET DOUBLE! Philosophie du Code de la route

"Ce qui ne me tue pas me rend tétraplégique"

En librairie


Pourquoi y a t-il toujours des bouchons sur ma route à moi ? Et pourquoi suis-je le seul à savoir conduire ? Sur la route, on peut se laisser aller à toutes nos tendances : l’égoïsme, le sentiment de puissance, la haine des autres, la diplomatie ou la colère.
La conduite automobile est révélatrice de notre existence en général. Et une philosophie du Code de la route, un bon moyen de faire de la philosophie tout court : la liberté, l’État, la morale, sont des notions abstraites qui deviennent très concrètes au coin d’un rond-point ou au détour d’un feu rouge. Voici le seul livre qui vous fera rire même lorsque vous aurez perdu tous vos points.



" Sur une route nationale qui traversait une petite ville, j’ai vu que la vitesse était soudain limitée à 30 km/h. C’est peu. J’ai bien essayé. J’ai ralenti, ralenti pour rester au plus près de la limite et franchement, c’est vraiment très lent ! Sur le moment, j’ai bien eu le sentiment d’être l’automobiliste le plus absurdement obéissant de toute la création. Pas un chat, pas une voiture, pas un piéton dans ce bled paumé, et moi qui me traîne à 30 km/h pour respecter le code de la route. Enfin, à peu près à 30 km/h. Quelques jours plus tard, j’ai appris par la poste que je m’étais fait flasher à 37, ce qui, d’après le ministère de l’intérieur de la République Française, mérite que je perde 1 point sur mon permis et 90 euros d’amende ! Franchement, ça énerverait n’importe qui, non ? Pendant que certains font les quatre voies sur l’autoroute sans être inquiétés, que le ministre lui-même grille les feux impunément, on me verbalise pour rien. Quelle différence ça fait, 30 ou 37 km/h ? On aurait dû me filer une médaille à la place d’un p.-v., pour avoir été le conducteur le plus lent de toute la journée ! "

jeudi 23 juin 2011

Philosophie des radars "pédagogiques"

Les gens refusent les radars et revendiquent le droit de mourir dans la stupidité.

L'intérêt général, la conservation même de la vie de chacun exige que l'on retire les panneaux signalant la présence de radars - car, en général, dès qu'on aperçoit ce genre de panneau, on pile, et on rétrograde de 180 à 80 km/h en 3 s. Mais la mesure est tellement impopulaire que le ministre a fini par trouver un moyen terme - très moyen : les radars "répressifs" seront précédés par des radars "pédagogiques". En bref, on ne prévient plus, mais on donne un indice. (Mais chut!)

Comme on a pu le noter dans la Philosophie du Code de la route, ce qui est étonnant dans toutes ces polémiques, c'est la notion de "prévention", de"pédagogie". On voit assez de pubs où on nous vend des voitures "de rêve" (en citant même Shakespeare pour la Giulietta) : "sans coeur nous ne serions que des machines". Et sans cerveau ? Les voitures actuelles se veulent "suréquipées", saturées des moyens technologiques les plus au point: ABS, GPS, clim', mon cul sur la commode, etc. Bref, tout un attirail qu'on ne ne saurait confier qu'à des grandes personnes. Mais non, pendant qu'on joue les grands, les riches et les puissants, on continue à pleurnicher et à réclamer plus de "pédagogie": on est assez grand pour s'acheter un 4x4, un crossover, toutes sortes de monstres mécaniques pour montrer qu'on est "quelqu'un", mais quand il s'agit de respecter les règles, on a manifestement autant de sagesse et de conscience qu'un gamin de moins de 7 ans.

Il y a une sorte de contradiction entre ces voitures suréquipées pour grandes personnes et cette demande de "pédagogie" et d'indulgence face à la loi. Un peu comme si on mettait un enfant au volant d'un Hummer. La technique offre les moyens aux conducteurs d'être toujours plus irresponsables - en leur donnant même des détecteurs de radars- un peu comme elle permet à certains de photographier les sujets du BAC avant l'heure.

Bref, il faudrait savoir : on est un grand qui peut conduire une grosse voiture suréquipée, et alors, on est un grand - on sait se tenir, on conduire, rouler raisonnablement - ou alors, on est un enfant qui a besoin de "pédagogie", de "prévention". Alors, on doit s'en tenir à la bicyclette avec les petites roues.

Des radars "pédagogiques"? Dites, sur votre grosse bagnole suréquipée, y a pas un compteur de vitesse?

samedi 11 juin 2011

On peut être poète et cohérent, bordel ! -2

La dénonciation des incohérences dues à la fainéantise de l'homme de lettres qui tente de la dissimuler sous le pauvre vernis de la liberté du poète est un combat sans fin. On l'a vu ici, même les plus grands se sont rendus coupables d'abjections de ce type. Quelques moins grands aussi, bien évidemment.

Ainsi, le groupe de R'n'B français Tragédie, dans son hommage subtilement mixte au Tommy de The Who et au Roméo et Juliette de Shakespeare sobrement intitulé Hey Ho assène sur une musique envoutante ces paroles limpides "Est-ce que tu m'entends ? Hey ho ! Est-ce que tu me sens ? Hey ho ! Touche-moi je suis là, Hey ho, ho ho ho ho ho ho !". Le parallèle avec Tommy est évident, le leitmotiv de cet opéra rock étant le fameux "See me Feel me Touch me Heal me". Jusqu'ici rien de bien incohérent ne survient dans l'analyse du texte de Tragédie, mais le refrain doit être resitué dans le contexte global du propos de la chanson pour qu'on en saisisse bien les tenants et les aboutissants.

Si dans See me feel me la mère de Tommy s'adresse désespérément à son enfant rendu aveugle sourd et muet par le traumatisme de l'assassinat de son père, dans Hey ho le locuteur s'adresse, ainsi que le premier couplet le laisse clairement entendre, désespérement à sa dulcinée derrière sa fenêtre, lui-même étant en bas dans la rue (on voit donc bien ici le parallèle avec Roméo et Juliette) : "Ca fait longtemps, en bas de ta fenêtre, J'appelle vainement mais personne ne répond, Fais juste un signe pour montrer que t'es là Ho yé ho ho ho ho ho". On passera sur l'élision du qu' attendu devant l'en-bas, licence destinée à équilibrer la ryhtmique à l'instar du mythique "j'sais pas q'est-ce qui s'passe" dans le Femme like U de K-Maro, autre figure du R'n'B à la française du début de ce siècle, pour insister sur le sens du texte.

Tel Roméo interpellant Juliette, Tizy Bone (ou Silky Shai, il est difficile de discerner lequel des deux duettistes s'exprime), s'adresse d'en bas de [sa] fenêtre à celle qu'on imagine être sa chère et tendre (et qui, contrairement à Juliette, ne lui répondra pas, et c'est sans doute là qu'est la tragédie). Donc, Tizy Bone est dans la rue, et machine (on ne connait pas son nom) est, a priori, derrière sa fenêtre, dans son appartement. On ne sait pas à quel étage, mais j'imagine qu'elle n'est pas au rez-de-chaussée, car dans ce cas Tizy Bone s'adresserait à elle non pas d'en bas de [sa] fenêtre mais plutôt de devant sa fenêtre. Et c'est là que je m'insurge. Car si l'on comprend bien qu'il lui demande si elle l'entend, voire même si elle le sent, comment peut-il imaginer qu'elle pourrait le toucher ? Même si elle était au premier étage, il lui faudrait des bras de deux mètres, pour le toucher ! Hey ! Ho ! N'importe quoi ! On peut être poète et cohérent, bordel !

mercredi 8 juin 2011

Philosophie de Walt Disney: le complexe de Robin des Bois

L'interprétation des rêves

Savez-vous comment Robin des Bois parvient à libérer ses amis de prison dans le dessin animé de Walt Disney? Il vole les clés au Shérif de Nottingham. Comment? Il attend la nuit. Le shérif qui garde les clés de la prison autour de sa ceinture est endormi, si bien que sa vigilance est affaiblie. D'ailleurs, pour l'endormir un peu plus, Robin des bois chante une berceuse. Mais ça ne suffit pas: on imagine ce qui pourrait se passer si le shérif se réveillait tout à coup et voyait robin des bois en train de lui voler ses clés. Alors, Robin des bois doit se déguiser en vautour pour prendre l'apparence des gardes. Quand le shérif ouvre un oeil distrait, il croit reconnaître l'un de ses hommes et ne réagit pas.

Or, c'est de la même manière que Freud interprète la signification des rêves, bien qu'il n'ait jamais vu ce dessin animé. On a souvent du mal à expliquer ses propres rêves: certains sont incohérents et d'autres représentent des scènes si gênantes qu'on ne les a jamais racontées à personne. Pourtant, d'après Freud, ce sont bien mes désirs qui s'expriment dans mes rêves ou plutôt, les désirs de mon Inconscient. Et s'ils sont inconscients, c'est parce qu'ils sont inavouables ou inacceptables pour ma conscience; c'est parce que, d'une manière ou d'une autre, je les ai refoulés. Mais tout le monde sait que ces pensées que je refuse cherchent à se rappeler à moi, notamment dans le fameux lapsus révélateur, qui conduit certaines à parler de "fellation" à la place "d'inflation". Et c'est surtout dans le rêve que ces désirs, pensées se révèlent le plus couramment et facilement.

D'abord, parce que dans le sommeil, le censure qui a pour fonction de refouler les pensées inacceptables - comme le ferait un videur de boîte de nuit -, est moins vigilante. Tout comme le shérif qui dort. Et les désirs ou pulsions inconscients, à l'image de robin des bois, parviennent plus facilement à la conscience. D'ailleurs, la première technique adoptée par Freud pour amener ses patients à exprimer leurs pensées inconscientes était l'hypnose, pareille à celle que pratique robin des bois en chantant une berceuse au shérif: le mécanisme est toujours le même, en affaiblissant la vigilance de la censure, on permet aux indésirables de se montrer.

Mais comme dans le dessin animé, les désirs doivent quand même se déguiser, sous peine de réveiller la censure. C'est ce que Freud appelle le travail onirique - relatif au rêve. Ainsi, le contenu manifeste du rêve, l'histoire dont on peut se souvenir et qu'on peut raconter au réveil, n'est pas le contenu réel du rêve, qui est latent, c'est-à-dire caché. Il faut interpréter le rêve pour comprendre quels désirs ou pensées s'y sont exprimés. Selon Freud, il existe de nombreuses techniques de déguisement, la principale étant sans doute la symbolisation. Les images que je me représente dans mes rêves sont les symboles de mes désirs et n'ont pas un sens littéral: par exemple, les rêves d'envol ou de vol on à voir avec la sexualité - comme l'exprime la formule, "aller au 7ème ciel. Les rêves de chute se réfèrent à l'enfance et rappellent les jeux d'enfants, tourniquets, toboggan, etc. Quand on rêve qu'on perd ses dents, c'est un symbole de castration et si on rate un train, c'est qu'on cherche à se rassurer vis-à-vis de sa crainte de mourir - le départ du train, c'est ma mort (il est parti, il nous a quittés, etc.), et le rater signifie: "ne t'inquiète pas, ce n'est pas pour tout de suite.

Freud n'a jamais vu Robin des bois. Quant à savoir si Walt Disney a lu Freud, c'est une autre histoire.